Réalisateur, scénariste et metteur en scène de théâtre, Ingmar Bergman est né le 14 juillet 1918, à Uppsala. Son père étant pasteur luthérien, le jeune Ingmar est vite confronté à la religion. Il reconnaîtra plus tard que ses souvenirs d'enfance ont inspiré certaines de ses plus grandes œuvres. A l'université de Stockholm, il consacre ses loisirs à la mise en scène théâtrale. De 1938 à 1944, il monte une vingtaine de pièces avant de devenir metteur en scène professionnel de théâtre. Il rencontre Carl-Anders Dymling, de la société de production Svensk Filmindustri, qui lui demande d'écrire un scénario pour le réalisateur Alf Sjoberg : TOURMENTS, en 1944.
L'année suivante, il réalise son premier film, en adaptant une pièce de Leck Fischer, "Crise". Dès lors, Bergman mène une double activité de cinéaste et d'homme de théâtre, tout en continuant à écrire des scénarios pour d'autres. Les cinq premiers films que Bergman réalise sont profondément influencés par l'esthétique du réalisme poétique français. Au cœur de son œuvre, un pessimisme fondamental mêle les thématiques du désespoir, de l'avortement, du suicide et du passé douloureux. PRISON (1948) et LA FONTAINE D'ARETHUSE (1949), dont Bergman est l'auteur complet, concentrent ces constantes sur fond d'angoisse existentielle proche de la philosophie de Sartre. VERS LA FELICITE (1949) marque une rupture avec cette inspiration désespérée. C'est alors une longue série de films au cours desquels Bergman s'interroge sur le sens de la vie (JEUX D'ETE-1950), sur la misère d'un monde sans amour (LA NUIT DES FORAINS1953), sur la supériorité de la femme sur l'homme (MONIKA-1952, L'ATTENTE DES FEMMES-1952, SOURIRES D'UNE NUIT D'ETE-1955), sur le désert de l'égoïsme (LES FRAISES SAUVAGES-1956), sur l'existence de Dieu (LE SEPTIEME SCEAU-1957) ou sur les problèmes de la maternité (AU SEUIL DE LA VIE-1958), ou sur l'illusion (LE VISAGE-1958). Avec A TRAVERS LE MIROIR (1961), Bergman abandonne la brillante mise en scène de ses films précédents.
Il commence à mettre en application un souhait maintes fois exprimé : réaliser tout un film à partir de l'exploration d'un visage. Il isole quelques personnages dans un décor désormais privilégié : l'île qui symbolise le huis clos à ciel ouvert. Abandonnant tout effet stylistique, la caméra n'enregistre que l'essentiel. A l'image d'une pensée qui, pour mieux progresser, remet en cause ses conclusions provisoires, les films de Bergman se répondent, s'enrichissent ou se nient. Premier volet des "films de chambre" d'un dépouillement absolu, A TRAVERS LE MIROIR détruit le mythe d'un Dieu transcendant symbolisé par l'araignée hallucinatoire vue par une jeune femme au bord de la folie. LES COMMUNIANTS (1962) consacre la mort d'un Dieu-Amour qui n'est, pour le croyant, qu'une manière de parler vainement à soi-même. LE SILENCE (1963) marque la fin des interrogations métaphysiques. Après TOUTES CES FEMMES (1964), pochade qui fustige le rôle parasitaire de la critique, Bergman entreprend une riche et complexe trilogie : PERSONA (1966), L'HEURE DU LOUP (1967), LA HONTE (1968).
Il s'intéresse à la création de l'œuvre d'art, au monde étrange et angoissant des fantasmes, à l'échange des personnalités et à la condamnation de la guerre, filmée d'une manière à la fois réaliste et abstraite. Après avoir adapté sa nouvelle méthode à des thèmes plus anciens (l'art dans LE RITE1968, les difficultés du couple dans UNE PASSION-1969 et LE LIEN-1970, la mort dans CRIS ET CHUCHOTEMENTS-1972), Bergman tourne huit épisodes d'un film destiné en même temps à une chaîne de télévision et au circuit commercial : SCENES DE LA VIE CONJUGALE (1973). Il réalise dans des conditions identiques LA FLUTE ENCHANTEE (1974) d'après Mozart. Alors que FACE A FACE (1975) remporte un impressionnant succès commercial, des difficultés fiscales obligent Bergman à interrompre brusquement les répétitions de "La Danse de mort" qu'il met en scène à Stockholm en janvier 1976. Exilé à Munich, il réalise L'ŒUF DU SERPENT (1976) : pour mettre en images la situation désespérée d'une Allemagne dont la misère économique et morale donnera lieu au régime hitlérien, il revient à une mise en scène expressionniste.
Pour SONATE D'AUTOMNE (1977), il organise la tragique confrontation entre une mère, Ingrid Bergman, et sa fille, Liv Ullmann. Avec FANNY ET ALEXANDRE (1982), annoncée comme son œuvre ultime, le cinéaste revient sur son enfance dans un film en costumes à la tonalité moins désespérée. Pourtant, Bergman continue à tourner, mais en se consacrant désormais exclusivement à la télévision : APRES LA REPETITION (1984) explore les rapports passionnels d'un metteur en scène de théâtre (double du cinéaste) avec ses actrices, tandis qu'EN PRESENCE D'UN CLOWN (1998) évoque de nouveau l'enfance de son auteur. Bergman poursuit entre-temps son intense activité théâtrale et publie, en 1987, son autobiographie, "Laterna Magica." Suite très attendue de SCENES DE LA VIE CONJUGALE réunissant de nouveau Liv Ullmann et Erland Josephson, SARABAND (2003) est un constat d'une terrible lucidité sur les liens familiaux.
Rezo Films